Le 17 juin 1962,
Alger
Alger
Témoignage de sa sœur Antoinette Xicluna, née Santamaria.
Une de mes amies m’a informée que vous établissez un dossier sur les disparus d’Algérie. Aussi, je me permets de vous faire parvenir les informations suivantes concernant mon frère.
Voici les faits : mon frère a passé la nuit du 16 au 17 juin 1962, chez des amis, rue Lavoisier à Bab-el-Oued. Il a quitté ces lieux le matin à 7 h 30, à bord de sa voiture, une Dauphine beige immatriculée 790 FF 9A. Il s’est fait intercepter et arrêter peu après par la police algérienne. D’après nos renseignements, et le témoignage d’une femme (dont malheureusement, je n’ai pas eu sur le moment, la présence d’esprit de noter les coordonnées), qui m’avait téléphoné après l’annonce que j’avais passée dans le journal La Dépêche Quotidienne du 21 juin 1962, et m’a certifié avoir vu mon frère se faire arrêter et emmener par trois policiers algériens, mitraillettes dans le dos, pour se diriger vers la pharmacie « La Régence ». Cela s’est passé Place du Gouvernement.
J’ai renouvelé l’annonce parue dans la presse environ un mois après, sans obtenir d’autres informations. Je me suis adressée à la Croix-Rouge Internationale et à Hydra et je n’ai pu obtenir aucun renseignement sur la disparition de mon frère, à part qu’il n’était toujours pas retrouvé. Il est probable que mon frère a appartenu à l’O.A.S. Il a été déclaré « décédé » le 17 juin 1962, suite au jugement du 3 février 1967 du tribunal de grande instance de la Seine, estampillé par le consulat de France à Alger. Bien entendu, aucune preuve du décès n’a, jusqu’à ce jour, été donnée à la famille !
Mon frère avait un signe particulier : après un accident de moto, une broche lui avait été placée au tibia droit. Nous attendons toujours que la France reconnaisse, admette et honore nos chers disparus. Par contre, nous, nos enfants, les enfants de nos enfants… et leur descendance, n’oublierons jamais la lâcheté de la Mère Patrie !